Page:Charron - De la sagesse, trois livres, tome II, 1827.djvu/188

Cette page n’a pas encore été corrigée

il se trouvera qu’il y a plus de quoy se loüer des bons succez que se plaindre des mauvais ; et comme nous destournons nos yeux de dessus les choses qui nous offensent, et les jettons sur les couleurs verdoyantes et gayes, ainsi debvons-nous divertir les pensées des choses tristes, et les adonner à celles qui nous sont plaisantes et agreables. Mais nous sommes malicieux, ressemblans aux ventouses qui tirent le mauvais sang et laissent le bon ; l’avaricieux qui vendroit le meilleur vin et beuvroit le pire ; les petits enfans, ausquels si vous ostez un de leurs jouets, jettent tous les autres par despit. Car s’il nous advient quelque mesadventure, nous nous tourmentons et oublions tout le reste qui nous demeuroit entier : voire y en a qui se disent malheureux en toutes choses, et que jamais n’eurent aucun bien,