dence vouloir
arriver à la justice. Et que dirons-nous de
l’invention des gehennes
[1], qui est plustost un
essay de patience que de verité
[2] ? Car celuy qui
les peust souffrir, et ne les peust souffrir,
cachera la verité. Pourquoy la douleur fera-elle
plustost dire ce qui est que ce qui n’est pas ?
Si l’on pense que l’innocent est assez patient
pour supporter les tourments, et pourquoy
ne le sera celuy qui est coulpable, estant
question de sauver sa vie ?
Illa tormenta gubernat dolor ; moderatur natura
cujusque tum animi tum corporis, regit quæsitor,
flectit libido, corrumpit spes, infirmat matus, ut
in tot rerum angustüs nil veritati loci relinquantur
[3]
.
Pour excuse on dict que la torture estonne le coulpable,
l’affoiblit, et luy fait confesser sa fausseté ; et au
rebours fortifie l’innocent : mais il s’est tant
souvent veu le contraire, cecy est captieux,
et, à dire vray, un pauvre moyen, plein
d’incertitude et de doubte. Que ne diroit et ne
feroit-on pour fouir à telles douleurs ?
etenim innocentes mentiri cogit dolor
[4] ; tellement qu’il
- ↑ Des tourmens de question.
- ↑ Ceci est copié de Montaigne.
- ↑ « Ces tortures qu'inventa la douleur, font plus ou moins d'impresssion selon le caractère, l'ame, le plus ou moins de force du corps : celui qui les inflige au patient, interroge à son gré ; la passion fléchit dans la réponse ; l'espérance l'altère ; la crainte l'infirme : de sorte qu'au milieu de tant d'incertitudes, il n'y a plus moyen de démêler la la vérité ».
- ↑ « Car la douleur force les innocens mémé à mentir ». Publ. Syr.