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le peuple du pôle

toute sincérité : chacune des existences successives que nous subissons est un songe plus ou moins affreux, mais il faut bien qu’on s’éveille un jour… Quand donc m’éveillerai-je de ce songe ?… »

Je ne sais rien, sinon que ce doit être, en ce moment, sur la banquise, l’hiver et la grande nuit qui dure six mois. Au delà des murailles de brume, au lieu de l’infini amoncellement de vagues blancheurs que j’apercevais jadis, il n’y a plus que de l’ombre. Le fantôme de soleil qui s’éternisait récemment encore à l’horizon ne se montre plus jamais, et aux heures où s’évanouit la clarté violette, les nuits sont profondément noires sous le ciel éclaboussé de myriades d’astres.

Je ne sais rien… Un seul espoir me soutint durant ma convalescence : celui de la venue probable d’autres explorateurs dans ce monde-ci… Je me rappelais que c’était au cours de l’été de 1906 que Wellmann et ses compagnons devaient prendre leur vol au Spitzberg ; peut-être que si les ressources de leur savoir, de leur courage et de leur énergie toute fraîche se joignaient un jour à ma connaissance actuelle du pays, il nous serait possible d’en repartir ensemble à notre gré et de n’y revenir par la suite qu’avec la certitude d’agir en maîtres… Et je me mis à guetter