Page:Charles Derennes Le peuple du pôle 1907.djvu/154

Cette page n’a pas encore été corrigée
150
le peuple du pôle

même façon que nous ? dit Ceintras, sans avoir l’air de prendre garde à mes dernières paroles. Ils vivent en société, ils sont intelligents, peut-être même le sont-ils dans des proportions qui dépassent tout ce qu’il est humainement possible de concevoir… Mais ce n’est nullement là une raison pour que leurs sentiments ne diffèrent pas profondément des nôtres. Et s’ils ignorent la pitié, la clémence, que va-t-il advenir de nous ?

— En tout cas, dis je, ils semblent éprouver la peur, tout comme les hommes. Qui sait ? nous sommes pour eux des objets d’horreur, des cauchemars réalisés…

— Ils ont peur, évidemment. Mais ils paraissent aussi, — heureusement ! — tourmentés par une grande envie de s’instruire sur notre compte. Dire qu’il serait si simple de nous entendre !… Mais regarde, voici la nuit qui, dans un instant, va nous condamner à l’impuissance !…

Il n’eut pas plutôt prononcé ces mots que ma résolution fut prise. Je m’approchai de lui et, lui posant la main sur l’épaule, je lui expliquai qu’il existait un moyen d’éviter le sommeil. Je lui exposai également les raisons pour lesquelles je n’avais pas cru devoir le mettre au courant. Il m’approuva, — il lui était bien difficile de faire autrement, — mais je compris qu’il ne pouvait