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sa naissance, ses progrès & sa perfection.

Oserois-je bien assurer, que si le pére des lumiéres n’avoit point daigné éclairer les hommes, je ne serois pas moi-même idolâtre ?

Né peut-être au sein des plus profondes ténèbres & de la plus monstrueuse superstition, j’aurois croupi dans la fange de mes préjugés ; je n’aurois apperçû dans la nature & dans mon propre être qu’un cahos. & si j’avois été assés heureux ou assés malheureux pour m’élever jusqu’au doute sur l’auteur des choses, sur ma destination présente, sur ma destination future, etc. Ce doute auroit été perpétuel ; je ne serois point parvenu à le fixer, & il auroit fait peut-être le tourment de ma vie.

La vraye philosophie pourroit-elle donc méconnoître tout ce qu’elle doit à la religion ?

Mettroit-elle sa gloire à lui porter des coups, qu’elle sçauroit, qui retomberoient infailliblement sur elle-même ? La vraye religion s’éléveroit-elle, à son tour, contre la philosophie, & oublieroit-elle les services importans qu’elle peut en retirer ?