Page:Chapman - Les Fleurs de givre, 1912.djvu/32

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Scrutèrent du regard tous les coins du rivage,
Puis, suivant le sentier tortueux du portage,
Ils gagnèrent l’endroit où le vaillant Cadieux,
Pour sauver ses amis, s’était séparé d’eux,
Et, de là, s’enfonçant dans la nuit insondable
Des plus vastes forêts du pays de l’érable,
Durant une semaine, ils cherchèrent en vain.

Le héros vivait-il ? Était-il mort de faim ?
Un Indien portait-il, pendue à sa ceinture,
Ruisselante de sang, sa belle chevelure ?
Mystère !

                     Exténués, sans boussole, sans pain,
Les chercheurs s’apprêtaient à rebrousser chemin,
Quand soudain une croix brute, émergeant de terre,
A quelques pas d’eux, leur expliqua le mystère.
Et, s’étant approchés, mornes, silencieux,
Au pied d’un pin géant ils trouvèrent Cadieux
Mort et gisant au fond d’une fosse béante
Qu’il avait pu creuser de sa main défaillante.
Il semblait sommeiller, à demi recouvert
D’un épais linceul fait de feuillage encor vert.
Un sourire entr’ouvrait sa bouche froide et blême.
Ses maigres doigts roidis étreignaient un poème
Naïf comme son cœur, amer comme un sanglot,