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Où l’on entend à peine un gazouillis d’eau vive,
Éclate le sifflet d’une locomotive.
Un train de voyageurs s’avance. Le voici
Qui sort en rugissant d’un massif obscurci
Par la fumée aux flots tourbillonnants qu’exhale
Le grand monstre de fer. Plus prompt que la rafale
À travers l’infini du brumeux Océan,
Il rase l’entonnoir d’un abîme béant
Dont la profondeur sombre et morne est insondable.

Tout à coup un fracas sinistre et formidable
Retentit, dominant les mille bruits d’enfer
Du convoi tortueux sur les longs rails de fer.

Horreur !. Un lourd fragment d’un glacier géant glisse.
Et les pesants wagons dans l’affreux précipice
Croulent, tordus, troués, réduits en mille éclats,
Cent malheureux blessés gisent sur le verglas,
Affolés de douleur, éperdus d’épouvante ;
Et parmi les lambeaux de chair encor vivante,
Parmi les ais, les freins, les ressorts, les essieux,
Des bras désespérés se tendent vers les cieux,
Des cris et des sanglots dans des râles s’éteignent.

Un grand fauve de loin flaire les corps qui saignent
Dans la neige roulant en épais tourbillons