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Et les efforts sans nom de l’onde convulsive
Sont impuissants et vains contre la nef massive.
Derrière elle et comme elle inlassable et narguant
Les chocs vertigineux du sauvage ouragan,
La mouette poursuit sa course accoutumée
À travers le brouillard et la noire fumée
Qui monte de l’enfer allumé dans les flancs
Du rapide steamer en proie aux flots hurlants.
Contre les tourbillons croissants de la bourrasque
Elle vole d’une aile inconstante et fantasque,

Elle tournoie au ras des eaux l’éclaboussant,
Elle file tout droit, d’un trait calme et puissant,
Devant elle dardant un œil noir qui flamboie,
Et, parfois, frémissant d’une indicible joie,
Elle monte, elle plane, ou plonge tout à coup
Dans le creux tournoyant de la lame qui bout,
Remonte d’un coup d’aile au ciel voilé de brume,
Redescend aussitôt, se pose sur l’écume
De la vague, s’y berce, avec elle se fond,
Puis reprend un essor plus léger et plus prompt,
Nous rejoint, nous dépasse, et de nouveau s’arrête.
Ferme son vol, s’abat encore sur la crête
Des grands flots éraflés par l’âpre souffle amer,
Disparaît entre deux gonflements de la mer,
Reparaît, et, rasant les ondes éperdues,
S’efface dans la nuit des mornes étendues.