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sité de Chamfort, sa misanthropie furent des défauts sérieux ; il irrita souvent des gens qu’il aurait pu ramener. Il affligea des hommes honnêtes par des jugemens inconsidérés ; il provoqua sans le vouloir, il autorisa des passions perverses, et arma des hommes atroces de maximes violentes et de raisonnemens spécieux ; et quand il avait lancé un mot piquant ou accablant sur quelque homme que ce fût, il ne revenait plus sur l’opinion qu’il en avait donnée, non qu’il fût arrêté par la crainte méprisable de déprécier un mot vaillant, mais plutôt parce qu’il voulait se faire craindre d’un ennemi qu’il croyait trop blessé pour ne pas être irréconciliable : c’est ainsi qu’il resta toute sa vie le détracteur de La Harpe, parce qu’il l’avait été un jour ; il s’obstina à soutenir que cet excellent littérateur, dont il honorait d’ailleurs le patriotisme, ne savait pas le latin, parce qu’il l’avait surpris autrefois je ne sais dans quelle erreur sur le sens d’un mot de Tite-Live. Ces travers sont inexcusables, mais je ne puis pour cela passer condamnation sur des reproches qui attaquent le fond de son cœur. — Je vous entends ; mais, après tout, à quoi bon célébrer Chamfort ? Qu’a-t-il fait pour la révolution ? Il n’a pas imprimé une seule ligne pour en hâter ou en