Page:Chamfort - Œuvres complètes éd. Auguis t4.djvu/223

Cette page n’a pas encore été corrigée

DE CHAMFOIIT. 2 1 3

posez, sur le théâtre , une reine de Phénicie, qui, par ses grâces et sa beauté, ait attendri , intéressé pour elle les chefs les plus vaillans de l'armée de Godefroi , qui en ait même attiré quelques-uns dans sa cour, y ait donné asyle au fier Renaud dans sa disgrâce, l'ait aimé, ait tout fait pour lui , et qu elle voie s'arracher aux plaisirs pour suivre les pas de la gloire: voilà le sujet d'Armide en tra- gédie.

Le poète épique s'en empare ; et au lieu d'une reine tout naturellement belle, sensible , il en lait une enchanteresse. Dès-lors, dans une action simple, tout devient magique et surnaturel. Dans Armide, le don déplaire est un prestige; dans Pœnaud, l'amour est un enchantement: les plai- sirs qui les environnent , les lieux même qails habitent, ce qu'on y voit, ce qu'on y entend, la volupté qu'on y respire, tout n'est qu'illusion, et c'est le plus charmant des songes.

Telle est Armide, embellie des mains de la muse héroïque. La muse du th/Atre la réclame et la reproduit sur la scène, avec toute la pompe du merveilleux. Elle demande, pour varier et pour embellir ce brillant spectacle, les mémos licences que la muse épique s'est données ; et , appellant à son secours la musique, ia danse, la peinture, elle nous fait voir, par une magie nouvelle , les prodiges que sa rivale ne nous a fait qu'imaginer. Voilà Armide sur le tliéâirp Ivii.Tiie : il voil;) l'idée

�� �