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244 OEUVRES

Mémoires, moiitreut à quel point cet orgueil n()])iiiaire peut détruire rhumanité dans le cœur de ceux (ju! a corrompus. Nous n'en cite- rons qu'un seul exemple. Le lendemain de la ba- taille d'Ettiniihen , Richelieu fut cliarw de faire enlever les morts. On sait que la vue d un champ de bataille est affreuse le lendemain d'une action; m.ais celui-là, surtout, faisait horreur: on en jugera par un seul trait: ]M. de Richelieu vit les corps des gens de son espbce^ mêlés et confondus sans jnénagement nvec ceux des simples soldats. C'est ce mélange dont il fut le plus saisi. M. de Richelieu a ait raison : c'est là luie des calamités qui consternent profondément une ânie noble. N'est-ce pas en effet ir.ie chose indécente que cette confusion des rangs jiarnu des gens tués la veille, et chez qui on eût j)u si aisément rétabHr l'ordre? n'est-ce pas une n)aihonnéieté grossière, un manque d'éducation dans le général ennemi, de n'avoir pas, immédiatement après sa victoire, commandé le triage des cadavres, afin de séparer du moins les espèces? Cet usage devrait être établi par les lois de la guerre, et même parle droit des gens. Grotiuset Pulfendoif sont impardonnables de n'v avoir pas songé. Quant à l'assemblée natio- nale n'en parlons pas. Elle a fait bien pis: elle a

confondu les espèces dans le genre, et même les espèces vivantes, ce qui est un peu plus contrariant. On serait tenté im moment de croire ces va- niteuses sottises assez châtiées par le lidicule qui

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