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II est vrai qu'en récompense , il eut l'honneur de s'asseoir dans cette académie à laquelle il avait insulté ; et le souvenir de ses railleries, approu- vées de ses confrères comme du public, n'em- pêcha pas que , dans sa harangue de compliment, le récipiendaire n'attribuât tous ses travaux à la sublime ambition d'être membre de l'académie. On voit, par les lettres de Voltaire, publiées de- puis sa mort, le mépris dont il était pénétré pour cette institution ; mais il n'en fut pas moins forcé de subir le joug d'une opinion dépravée , et de solliciter plusieurs années ce fauteuil , qui lui fut refusé plus d'une fois par le gouvernement. C'est un des moyens dont se servait la cour pour réprimer l'essor du génie , et pour lui couper les ailes ^ suivant l'expression de ce même Voltaire, qui reprochait à d'Alembert de se les être laissé arracher. De là vint que tous ceux qui depuis vou- lurent garder leurs ailes, et à qui leur caractère, leur fortune, leur position permirent de prendre un parti courageux, renoncèrent aux prétentions académiques ; et ce sont ceux qui ont le plus préparé la révolution , en prononçant nette- ment ce qu'f)n ne dit qu'à moitié dans les acadé- mies : tels sont îlelvétius , Rousseau , Diderot ;, Mably , Raynal et quelques autres. Tous ont montré liardiment leur mépris pour ce corps , qui n'a point fait grands ceux qui honorent sa liste; mais qui les a reçus grands , et les a rape- tisses quelquefois.

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