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Il se lève avec l’aube, et, l’outil sur l’épaule,
Il s’en va dans les champs tout humides encor,
Où sur chaque brin d’herbe et sur chaque corolle
Tremble une goutte d’eau, perle de nacre et d’or ;

Et là, tout enivré des parfums de l’aurore,
Il se met à chanter en aiguisant sa faux…
Le ciel gris, lentement, bleuit et se colore ;
Dans le taillis voisin s’éveillent les oiseaux.

Autour de lui bientôt tombe l’herbe fleurie…
Il revient au village et soigne son bétail.
Les vaches, les bœufs roux rêvant dans l’écurie,
Patients compagnons de son rude travail.

Puis il lui faut planter, herser, passer sans trêve  :
D’un labeur à quelqu’autre ;… il n’a jamais le temps
De se croiser les bras et d’ébaucher un rêve :
La réalité seule absorbe ses instants.

Il ne se forge point d’idéales chimères ;
Il vit au jour le jour, sans regrets, sans désirs,