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craties formelles. On est esclave économiquement. Politiquement, on dépend de la grande banque, de la grande presse qui se trouve aux mains de la grande banque. Mais, au point de vue formel, chaque habitant d’un grand pays démocratique se considère comme son propre maître. Tous les trois, quatre ou cinq ans, il a le droit de déposer dans les urnes un morceau de papier par lequel il a l’air de disposer de son propre sort. Il défend donc son propre pays.

Pendant la période monarchique, on n’était pas lié organiquement à son propre pays.

La guerre est considérée alors comme une affaire privée du monarque. Il ne demandait à personne la permission de faire la guerre. Il est vrai que l’on ne demande rien aujourd’hui non plus, mais, tout de même, on prépare l’opinion par la presse. On entraîne quelques chefs de parti, on consulte les hommes influents, on tient dans le secret des dieux des chancelleries certains journalistes. On fait des campagnes de presse. Et l’on obtient ce résultat que l’on a l’air de défendre vraiment son propre pays, tout en défendant les intérêts de la grosse métallurgie.

La littérature, la philosophie, le théâtre, l’église, la jeunesse universitaire, les professeurs, les corps enseignants, tout a été mis en jeu, pendant une certaine période, pour développer l’idéalisme nationaliste. Les hommes ont besoin d’un idéal. Il faut considérer le problème dans toute sa grandeur. Il est trop grave pour qu’on se limite à un seul point de vue. Il faut faire le tour du problème. Dans la guerre et tout ce qui s’ensuit, nous avons un ennemi formidable. Nous avons donc le devoir d’approfondir jusqu’à ses derniers confins tout le problème. Il faut dire toute la