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1. Brahm, qu’on appelle aussi Para-Brahma, est l’être suprême, unique, étemel, infini, illimité, existant par lui-même, sans commencement ni fin, substance universelle comprenant dans son sein tout ce qu’il y a d’immatériel et de matériel dans la nature. Il se manifeste, sortant des profondeurs de son essence, en s’unissant à Mata ou Para-Sacti, la mère et matrice des êtres, la première vierge et la première femme tout en même temps. De cette union mystique sort la Trimourti, triplicité qui renferme le principe actif sous trois formes : Brahma, la puissance créatrice, Vichnou, la puissance conservatrice, Siva, la puissance destructrice. De là découle aussi sous trois formes le principe passif composé de trois déesses : Sarasouati, qui devient l’épouse de Brahma, Lakchmi, celle de Vichnou, et Bhavani, celle de Siva. La Trimourti s’identifiant avec le dieu supérieur dont elle émane, il s’ensuit que chacune de ces déesses est simultanément sœur et fille de son époux, tous formant un ensemble, un quoique multiple, simple quoique complexe, composé de parties séparées quoique réunies, divises quoique indivisibles. Après ce grand acte de sa volonté, Brahm rentre dans le repos absolu, n’étant plus qu’une essence abstraite et quiescente.

Ce n’est cependant pas Brahm, cet être supérieur, que le peintre indien a voulu représenter dans ce personnage nu, dormant d’un profond sommeil, reposant mollement entre les replis d’une immense couleuvre, hydre dont les vingt têtes vigilantes s’inclinent pour former un dais qui le protège, dieu mystérieux couché entre le ciel et l’océan, dans une vaste prairie couverte d’une verdure éternelle et entouré d’un cercle de trente têtes humaines. Le grand Brahm n’est, en effet, qu’une abstraction métaphysique ne recevant dans l’Inde qu’un culte purement philosophique. C’est un dieu sensible et tangible, Brahma, qu’il faut plutôt y voir, Brahma au masculin, qu’il ne faut pas confondre avec Brahm au neutre, qui n’a point de genre, puisque l’Être suprême n’a pas de sexe. Suivant la théologie indienne, Brahma fut l’agent spécialement chargé par l’Éternel de créer et d’organiser ce vaste univers. Il venait de prendre naissance, et portant ses regards de tous côtés, il n’apercevait de ses yeux que la vaste étendue des eaux couvertes de ténèbres. Saisi d’étonnement et ne pouvant concevoir le mystère de son origine, il demeura longtemps absorbé dans sa contemplation. A la Gn, et comme il désespérait de sortir de ses perplexités, une voix retentit à son oreille et lui conseilla d’implorer Bhagavan ; c’est la collectivité de Vichnou et de Siva. Brahma obéit, dans le cours de ses méditations profondes, Bhagavan lui apparut sous la forme d’un homme aux mille têtes, emblème de l’humanité. C’est sans doute à ce moment solennel de la création que l’artiste aura voulu faire