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place.

Avant peu d’années, les artistes aujourd’hui groupés au boulevard des Capucines seront divisés. Les plus forts, ceux qui ont de la race et du sang, auront reconnu que, s’il est des sujets qui s’accommodent de l’état d’impression, se contentent des dehors de l’ébauche, il en est d’autres et en bien plus grand nombre, qui réclament une expression nette, demandent une exécution précise ; que la supériorité du peintre consiste précisément à traiter chaque sujet suivant le mode qui lui convient, par conséquent à n’être point systématique et à choisir hardiment la forme qui doit donner tout son relief à l’idée. Ceux-là, qui chemin faisant auront perfectionné leur dessin, laisseront là l’impressionnisme, devenu pour eux un art véritablement trop superficiel. Quant aux autres, qui, négligeant de réfléchir et d’apprendre, auront poursuivi l’impression à outrance, l’exemple de M. Cézanne (Une moderne Olympia) peut leur montrer dès à présent le sort qui les attend. D’idéalisation en idéalisation, ils aboutiront à ce degré de romantisme sans frein, où la nature n’est plus qu’un prétexte à rêveries, et où l’imagination devient impuissante à formuler autre chose que des fantaisies personnelles, subjectives, sans écho dans la raison générale, parce qu’elles sont sans contrôle et sans vérification possible dans la réalité.

Castagnary.