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confeſſeur, et au médecin je ne parlois que tête à tête : il dit alors au gardien de ſortir, et le gardien ne l’ayant pas voulu, il partit avec lui après m’avoir dit que j’étois en danger de mort. Le fait eſt que j’enrageois, et que je ne me ſouciois pas de vivre. Je reſſentois auſſi quelque ſatisfaction dans une démarche qui pouvoit démontrer aux cruels, qui me condamnoient à une priſon pareille, leur procédé inhumain.

Quatre heures après j’ai entendu le bruit des verrous, et j’ai vu le même médecin qui tenoit la bougie lui-même, et le gardien reſté dehors. J’étois dans la plus grande langueur, et je jouiſſois d’un véritable repos. Un vrai malade eſt exempt du tourment de l’ennui : j’ai reſſenti une vraie ſatisfaction en voyant le gardien reſté dehors. Je ne pouvois ſouffrir la vue de cet homme depuis l’explication du collier de fer.

Dans un petit quart d’heure j’ai informé le médecin de tout. Il me dit que ſi je voulois recouvrer ma ſanté il falloit éloigner de moi la triſteſſe, et je lui ai répondu qu’il n’avoit qu’à écrire la recette pour une pareille opération, et la donner au ſeul apothicaire qui pouvoit exécuter ſon ordonnance. J’ai