Page:Casanova Histoire de ma fuite 1788.djvu/184

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ſingulier de ce fait eſt que Tra il fin d’Ottobre, e il capo di Novembre il n’y a que minuit, et que ce fut poſitivement au ſon de la cloche de minuit du trente un d’Octobre que je ſuis ſorti de là, comme le lecteur va voir. Je le prie de ne pas vouloir d’après cette fidelle narration me dépêcher pour un homme plus ſuperſtitieux qu’un autre, ni pour un eſprit capable à cauſe d’un fait pareil de former un ſyſtême : il ſe tromperoit. Je narre la choſe, parcequ’elle eſt vraie quoiqu’extraordinaire, et parcequ’à cauſe de l’attention que j’y ai faite il m’eſt peut-être arrivé de me ſauver. Ce ne ſont pas les prédictions qui font arriver un fait quelconque, mais c’eſt le fait lui-même qui arrivant rend à la prédiction le ſervice de l’avérer : lorsque le fait n’arrive pas elle devient nulle ; mais il y a dans l’hiſtoire générale beaucoup d’évenemens, qui ne ſeroient jamais arrivés s’ils n’euſſent pas été prédits.

Voici comment j’ai paſſé la matinée jusqu’à dix-neuf heures pour frapper l’eſprit de ce méchant ignorant, pour porter la confuſion dans ſa frêle raiſon avec des images extraordinaires, et étonnantes, et pour le rendre par-là incapable de me nuire. Le matin après que Laurent, auquel j’ai donné