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— Imbécile, n’oublie pas le paradis ! » s’écria le saint, portier du paradis.

Mais, sans s’en inquiéter, le forgeron continua :

— « Pour mon dernier souhait, je demande que tout ce qui entrera dans ma bourse ne puisse en sortir sans ma permission.

— Décidément il te faut peu de chose pour te contenter. Je t’accorde tout cela. Fais-en bon usage et au revoir.

— Au revoir, au revoir, monsieur le bon Dieu !

— Triple idiot, tu t’en repentiras ! » ajouta saint Pierre en aparté.

Le bon Dieu remonta sur son âne, le saint prit le baudet par la bride et ils s’éloignèrent.

Depuis ce jour, ce fut comme un fait exprès, il ne passa plus que de loin en loin un voyageur par le carrefour, et bientôt le bonhomme Misère se vit à la veille de mourir de faim avec son compagnon Pauvreté, à qui il ne restait plus que les os et la peau.

Le diable eut vent de ce qui se passait et vint un jour frapper à la porte du bonhomme Misère.

— « Que veux-tu ? lui demanda ce dernier.

— Bonhomme Misère, je sais que tu n’as pas