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Le bossu ne se fit pas prier et se mit à chanter. Les tasses de « flippe » se succédèrent et les chansons aussi, et ce ne fut que vers minuit que le joyeux bossu songea à se retirer pour regagner la ferme. L’heure était bien tardive et le petit homme n’était pas bien hardi ; il prit cependant son courage à deux mains et dit adieu à ses nouveaux amis.

Tant qu’il fut dans les rues d’Albert, tout alla fort bien ; mais une fois dans la campagne la peur lui vint. Qu’avait-il à craindre, au fait ? Il faisait un clair de lune splendide, on n’entendait aucun bruit et les voleurs avaient certainement affaire avec d’autres personnes qu’un pauvre petit bossu sans le sou, retournant au logis. Le bossu se disait tout cela et cependant il n’en était pas plus rassuré.

Pour se donner un peu de courage, le petit bossu entonna d’une voix peu assurée la complainte de Geneviève de Brabant. Sa peur se dissipa complètement. Attribuant ce résultat à sa chanson, le petit homme la termina et, arrivé au dernier couplet, il commença Malbrough de sa voix la plus forte. Puis ce fut le tour de Damon et Henriette, du Juif errant, du Roi Dagobert et de