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voqué pour elle les difficultés les plus sérieuses ; et M. de Villèle, qui n’avait pour le jeune prétendant portugais ni sympathie politique, ni estime personnelle, fit les plus grands efforts pour détourner le cabinet espagnol d’une expédition dont l’intervention de l’Angleterre pouvait rendre la portée incalculable. Il ne prit pas moins de soin pour consolider à Lisbonne le trône très-menacé de dona Maria sur lequel D. Pedro avait appelé l’infant D. Miguel, son frère, à venir s’asseoir à côté de sa nièce, en conférant à ce prince la régence du royaume jusqu’à la majorité de sa future épouse.

D. Miguel n’éleva aucune objection contre ces arrangements ; il parut même les accueillir tout d’abord avec reconnaissance, soit qu’il suivît en cela son impulsion propre, soit qu’il se conformât aux conseils de la cour de Vienne, où il résidait depuis l’insurrection contre son père et son roi qui avait si tristement inauguré sa vie publique. Après avoir juré, sans prendre aucune réserve, fidélité à la constitution édictée par D. Pedro, l’infant se préparait, dans le courant de 1827, à se rendre en qualité de régent à Lisbonne, où son arrivée était attendue avec anxiété par les partis, partagés entre la crainte et l’espérance.

Tel était le drame que j’étais appelé à voir se dérouler devant moi, dans le cours de l’année 1827, lorsque je m’acheminai vers la Péninsule aux premiers jours du printemps ; tel était le théâtre si souvent visité par mon imagination, où j’allais marcher au milieu des souvenirs de l’histoire et des ruines récentes accumulées par la guerre.