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de produire, s’accroît nécessairement ; — le mouvement sociétaire se ralentit à chaque surcroît et rend plus difficile d’acquérir une honnête existence. Le crime cependant augmente ; — c’est là une conséquence directe de cette légère excitation de faculté humaine qu’on trouve à l’école, et qui a besoin de l’activité de la vie sociale pour atteindre son plein développement. Dans ces circonstances l’éducation ne fait guère plus qu’aiguiser les facultés humaines pour mettre l’homme en état de se ruer sur ses semblables comme sur une proie. — C’est là la présente tendance en Angleterre et chez tous les peuplés qui marchent dans sa voie[1].

Parmi ces derniers, en règle générale, on peut placer les États-Unis, — quoique cependant occupant une position entre les classes très-différentes que nous avons établies. Dans les États du Nord, presque tous les enfants reçoivent un certain degré d’éducation ; mais lorsqu’ils passent de l’école dans le monde, ils trouvent qu’excepté la seule agriculture, une agriculture nullement savante, ces professions qui visent à augmente la quantité, ou à améliorer la qualité des utilités au service de l’homme, sont fermées pour eux. Le négoce, le barreau, et plus les professions abstraites sont au contraire toujours ouvertes, et absorbent ainsi une proportion indue de la masse de faculté qui a été développée dans les écoles[2].

Les conséquences ont été la formation d’une classe de population flottante toujours disposée à presque toute invasion dans

  1. Dans une occasion récente, lord Campbell adressait au grand jury du comté de Chester, à propos de l’état de la morale publique dans cette localité, un discours dont voici le résumé.
      « Le calendrier qui se déroule devant lui est effrayant. Il n’y a que trois ou quatre mois depuis la tenue des dernières assises et que la geôle a été vidée, et voici aujourd’hui une autre liste de crimes dont le degré fait frémir et dont le nombre est alarmant. Non-seulement les causes sont nombreuses, mais les cas sont de la teinte la plus sombre. Les voici exposés devant vous par groupes rangés selon l’ordre alphabétique, et sous chaque tête d’ordre le nombre des cas est considérable (ici l’émunération des sortes de crimes) ; il y en a qui n’avaient pas encore été nommés chez nous. C’est un fort triste état de choses. La faute cependant n’en est pas aux fonctionnaires, ils ont sans nul doute rempli leurs devoirs de magistrats pour que la loi fût exécutée, l’ordre maintenu, les droits de propriété assurés ; mais une considération importante et sur laquelle on doit réfléchir, c’est que notre prospérité matérielle ayant augmenté, le crime a augmenté aussi dans quelques parties du pays. Il avait espéré que grâce au progrès de l’éducation et à l’instruction religieuse que donne le clergé, un meilleur état de choses se serait présenté. »
  2. Voir précéd., vol. II, p. 246, 258.