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de la femme. Dans l’une, il y a tendance uniforme à modifier la loi anglaise dans le but de donner à la femme un droit de posséder en propre et séparément ; dans l’autre, il y a en comme une tendance uniforme à enlever à la femme le pouvoir, dans aucune circonstance, d’obtenir en propre le droit de posséder.

Un voyageur français distingué, M. Michel Chevalier, comparant ses compatriotes aux hommes d’Amérique, a dit : « Nous achetons nos femmes avec notre fortune aussi bien que nous nous vendons à elles pour leur dot. » fait remarquer que l’Américain choisit la sienne, ou plutôt s’offre à elle « pour ce qu’il lui reconnaît de beauté, d’intelligence et de qualités du cœur ; c’est l’unique dot qu’il recherche. Ainsi tandis que le Français fait une affaire de commerce de ce qu’il y a de plus sacré, une nation de marchands affecte une délicatesse et une élévation de sentiments qui auraient fait honneur aux plus parfaits modèles de la chevalerie[1]. »

D’où l’on voit que le mariage est chez nous un lien plus sacré que partout ailleurs ; — ça été la conséquence nécessaire d’un système politique basé sur la création de centres locaux et sur cette division de la terre qui tend à ce que chacun puisse arriver à la possession d’une demeure pour le bien-être de sa femme, de ses enfants et de lui-même[2]. Partout ici, l’on montre, à l’égard du sexe, — jeune ou vieux, — riche ou pauvre, — de la haute classe ou de la classe inférieure, — une déférence au-dessus de ce qu’on peut imaginer dans les autres pays[3].

Elles voyagent, pour des milliers de milles, sans avoir besoin d’une protection, sans avoir à craindre d’importunités, ni aucun de ces inconvénients auxquels les femmes sont tellement exposées dans les autres pays. En se mariant, l’homme prend la tâche de pourvoir aux besoins de la famille ; la femme a la tenue du ménage et le soin des enfants, — et son travail lui est autant que

  1. Chevalier. Lettres sur l’Amérique du Nord.
  2. Vous pouvez juger de la moralité d’un peuple par celle de ses femmes. On ne peut voir la société américaine sans admirer le respect qui entoure le lien du mariage. Ce sentiment exista au même degré chez les peuples de l’antiquité ; les sociétés actuelles de l’Europe ne conçoivent pas même l’idée d’une telle pureté de mœurs. — M. de Beaumont.
  3. « Une des particularités qui frappent le plus le voyageur aux États-Unis, c’est la déférence qu’on y a en tous lieux pour le sexe, sans que cela tienne au rang ou à la position, Lyell. »