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mières et les utilités achevées se rapprocheraient, les premières acquérant la valeur pour s’échanger contre les métaux précieux, et les seconds la perdant. Le fermier et le planteur s’enrichissant, l’agriculture deviendrait une science, la terre et le travail seraient en hausse, le drap et le fer iraient en baisse, effets inévitables de la demande de main-d’œuvre et de ses produits succédant plus vite à la production.

§ 4. — La production s’accroît à mesure que décroît le pouvoir du trafiquant et de l’agent de transport. Cette décroissance est une conséquence de la diversité dans la demande pour les pouvoirs de l’homme.

Dans le monde physique, moins il y a de frottement plus on obtient d’effet d’une force donnée. Il en est de même dans le monde social ; la force croît en raison de chaque diminution de frottement, et elle décroit pour peu que celui-ci augmente. Ici le frottement résulte de la nécessité d’employer le négociant et le transporteur, agents dont les profits augmentent à chaque temps d’arrêt de la circulation, tandis qu’ils diminuent à mesure qu’elle devient plus rapide. Pauvreté et esclavage envahissent sans s’arrêter les pays où le frottement augmente, par exemple, dans l’Irlande, l’Inde et la Jamaïque. La richesse et la liberté sont en progrès continu là où il diminue, par exemple en France, en Danemark et dans l’Allemagne du nord.

Les agents de trafic et de transport n’ajoutent point à la quantité des utilités à consommer. Le charretier qui transporte les produits de la ferme ne donne rien en échange pour la part que lui et ses chevaux consomment sur la grande route ; tandis que s’il était, lui et eux, employé à fournir d’autres utilités, la production serait accrue, et le pouvoir de consommation le serait aussi. Le négociant établi au port d’embarquement, le capitaine du navire et son équipage, le négociant étranger et l’entrepreneur de roulage qui transporte le produit jusqu’au lieu de consommation, tous prélèvent leur part et ne donnent rien en retour. Sur le lieu de la production, le blé nourrirait et le drap habillerait autant de monde que sur le lieu de la consommation. Plus les échanges sont directs et plus la consommation suit instantanément la production, avec une augmentation considérable de force.

Pour les hommes qui vivent du négoce et du transport, un accroissement de vitesse de circulation n’est nullement désirable ; la diminution de frottement serait suivie d’une perte de force en eux-mêmes. Il y a un siècle, le peuple de l’Inde transformait son coton en drap ; le métier à tisser fonctionnait tout près du champ