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quie et en Portugal où la circulation sociétaire décline, ainsi que le pouvoir de production, ce qui amène le cultivateur à payer pour rente et pour taxes, un taux de quotité de plus en plus élevé dans sa production. Elles absorbent une telle part qu’il lui est impossible de se procurer les premières nécessités de la vie.

Il y a un siècle on se plaignait en France que la rente et les taxes absorbaient les onze douzièmes de la production, — ne laissant qu’un douzième au cultivateur. Le tenancier anglais a moins encore aujourd’hui. — Il est douteux, comme nous avons vu, que pour sa part il reçoive même un vingtième du produit de son travail. Aussi sa condition est-elle au-dessous de celle de la classe correspondante, dans presque toute autre société qui prétend à être classée parmi les nations civilisées[1].

Le fermier s’interpose entre le propriétaire du sol et le journalier qui fait le travail ; le négociant entre l’homme qui fabrique le vêtement, et celui qui le porte ; le banquier, le courtier et mille autres intermédiaires entre le propriétaire du capital et celui qui a besoin de le mettre en œuvre ; l’homme de loi et l’agent parlementaire entre ceux qui veulent avoir des routes et ceux qui désirent en construire. C’est le système des intermédiaires, et, de là tant d’énormes fortunes que font les banquiers, les négociants, les agents et autres qui vivent aux dépens

    que nous arrachons chaque année à une population famélique, proviennent en partie de la rente de la terre, qui n’a jamais dépassé 13 millions et en partie des taxes. Il serait impossible d’ajouter la moindre chose à ce revenu, qui provient en partie d’une taxe foncière qui monte à 60  %, et est calculée non d’après la valeur de la terre, mais d’après la valeur probable de la récolte, et pour l’autre partie d’autres taxes établies sur des objets de toute nature, depuis le luxe et le vice jusqu’aux nécessités les plus indispensables de la vie. Et cependant ce faible revenu se lève sur un territoire aussi grand que l’Europe entière, infiniment plus fertile, mieux peuplé, bien plus complètement dans les mains du gouvernement, favorisé de trois ou quatre récoltes par an et qui donne en abondance tous les produits qu’on peut nommer tropicaux. » — Discours de M. Anstey à la chambre des Communes d’Angleterre.

  1. « Si nous possédons une énorme richesse, n’oublions pas que nous avons aussi un paupérisme énorme. Si nous avons des classes moyennes plus riches et plus éclairées que celles d’aucune autre nation, nous avons des classes pauvres et elles forment chez nous la majorité de la population plus ignorantes, plus infectées de misère et plus dégradées moralement que les classes les plus pauvres des pays de l’Europe du Nord. » — Kay. Condition sociale du peuple d’Angleterre et de l’Europe, vol. I, p. 6.