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nature, et qu’il n’y a pas eu de convention passée entre eux.

Il en est de même pour les métaux précieux. Si on lui eût demandé de désigner quelque autre substance, possédant les propriétés nécessaires pour rassembler en masse, puis diviser et distribuer et recombiner toutes les minimes portions de la force physique et intellectuelle qui résulte de la consommation quotidienne d’aliments ; quelque autre calculée pour entretenir et accroître le pouvoir d’association parmi les hommes ; quelque autre qui ait autant d’aptitude pour accroître le pouvoir de production, de consommation et d’accumulation, — il eût été forcé de reconnaître qu’il n’en existe pas, et que l’or et l’argent ont été destinés par le Créateur, comme instruments dont l’usage serait aussi nécessaire à la production de mouvement dans la société, que l’aliment pour la production de mouvement dans les animaux — chaque surcroît de facilité de les obtenir tendant infailliblement à faciliter le progrès de l’homme vers cet état de développement nécessaire pour le rendre apte à occuper dignement le rang honorable auquel il a été appelé.

Maintenant s’il est de vérité certaine qu’ils ont été destinés pour l’accomplissement d’un grand objet, on ne peut douter que la facilité accrue de les obtenir ne doive être une amélioration dans la condition de l’homme physique, moral et politique : Si au contraire ils n’avaient été que simplement l’objet d’une convention, on pourrait mettre en question si leur augmentation serait ou non avantageuse ; et M. Hume ne pense pas qu’elle le soit, comme on voit dans le passage suivant :

« Le plus ou moins d’abondance de monnaie est absolument indifférent puisque les prix des denrées et marchandises sont toujours proportionnés à la quantité de métaux précieux existant dans un État ; et une couronne du temps de Henri VIII achetait autant de marchandise qu’on en achète aujourd’hui avec une guinée. Lorsque la monnaie devient plus abondante, comme il en faut davantage pour représenter la même quantité de denrées, cela ne peut avoir nul effet bon ou mauvais pour un État, considéré à part, — pas plus d’effet que n’en aurait sur les livres d’un marchand la substitution des chiffres romains aux chiffres arabes[1]. »

  1. Hume. Essai sur la monnaie.