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pouvoir d’association dans tout l’État — des compagnies par actions se forment partout dans les divers buts d’exploiter la houille et les métaux, de fabriquer des étoffes, construire des routes, et des bateaux à vapeur et pour l’assurance contre les sinistres d’incendie. À chaque pas dans cette direction, le nombre et la force des centres locaux augmentent — des cités éclosant là où il y a peu d’années on obtenait à peine une maigre moisson du sol rebelle. À chaque pas le fermier trouve son marché plus à sa portée et il est plus apte à disposer de l’outillage amélioré nécessaire à sa profession. À chaque pas la demande pour le travail s’accroît — rendant de plus en plus nécessaire d’invoquer l’aide de la vapeur, et d’augmenter ainsi la richesse.

« Des milliers de bras robustes, » dit un écrivain récent, qui s’employaient naguère à l’agriculture, sont engagés dans des travaux mécaniques ; mais quoique les bras ne travaillent plus à la production des moyens de subsistance, les estomacs auxquels ils sont adjoints doivent tout aussi bien se remplir qu’auparavant. Le revenu de ces travailleurs ayant augmenté, ils consomment, dans leur rude travail, plus de substance nerveuse et musculaire, et il leur faut plus de nourriture et de boisson qu’auparavant ; et comme ils sont en état de les payer, ils causent un développement dans la demande des produits du sol. D’un autre côté, les rangs des gens de campagne vont s’éclaircissant et le fermier est menacé du danger de ne pouvoir obtenir à aucun prix des bras pour travailler sa terre…… Il y a dix ans, poursuit l’écrivain, nous n’avions pas ouï parler d’amélioration dans les instruments de culture — on employait pour retourner le sol la même charrue sur laquelle pesaient les Germains de Tacite, vêtus de peaux. La bêche, la pioche, la herse, la faux et le fléau, étaient les simples outils du journalier sur les grandes fermes comme sur le jardin du plus pauvre paysan. Quiconque introduisait pour son service une machine à vapeur, une machine à semer, ou une locomobile parfaite passait pour devoir avant peu faire faillite. Aujourd’hui tout cet outillage, avec des charrues de vingt sortes, est d’usage constant. Nous creusons des fossés, nous drainons, nous irriguons, nous fumons avec du guano, du salpêtre et de la poudre d’os — enfin, avec tout ce que la chimie recommande. L’assolement triennal avec ses jachères fréquentes ayant disparu devant le système rationnel de la rotation des