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étendue de son volume d’eau ou plus encore. J’aime surtout les ailes et le foie de jeune poulet et de pigeon domestique et tous les morceaux qui contiennent du sang. Je trouve plaisir à manger des écrevisses parce que ma mère en mangeait avidement pendant qu’elle me portait dans son sein, ainsi que des clovisses et des huîtres. Je mange plus volontiers que la viande, et aussi avec plus de profit, des poissons tels que soles, limandes, turbots, goujons, tortues terrestres, gardons, rougets ou mulets, barbillons, vangerons, brêmes de mer, cabillauds, loups de mer, cabots, ombrines et ombres ; comme poissons d’eau douce, brochets, carpes, perches, les deux espèces de brêmes, chevennes, vandoises ; les rascasses, le thon, les sardines salées, les tendres ou celles qui sont un peu plus fermes. Il est étonnant que je mange les clovisses avec délices et que j’évite comme du poison les moules et les coquillages même bons, et les escargots, sauf ceux qui ont jeûné. J’aime aussi les écrevisses et tous les autres crustacés d’eau douce (ceux des eaux salées sont trop durs), les anguilles, les grenouilles et les champignons (36) même dangereux. Je suis gourmand de douceurs, miel, sucre, raisins frais, melons mûrs depuis que j’ai compris leur valeur comme contre-poison, figues, cerises, pêches, moût, et je n’en ai jamais été incommodé.

J’ai un goût particulier pour l’huile, pure ou salée ou accompagnant des olives. L’ail me fait du bien, mais la rue, en tant que contre-poison aussi bien préventif que dans les cas d’empoisonnement déclaré, m’a toujours convenu dans ma jeunesse comme dans ma vieillesse. J’ai éprouvé aussi l’utilité de l’absinthe romaine.

J’ai sacrifié à Vénus sans excès, mais, quand j’en ai commis, ils ne m’ont pas beaucoup incommodé ; maintenant ils me fatiguent l’estomac d’une façon évidente.

J’aime — et je m’en trouve bien — les poissons pourvu qu’ils soient frais, tendres et cuits sur le gril, et la viande blanche. Je ne méprise pas le fromage de brebis bien gras. À tous les mets je préfère la carpe qui pèse de trois à sept livres, mais en choisissant les morceaux ; la tête est toujours bouillie, ainsi que les autres morceaux des gros poissons que je mange aussi à la casserole ; les petits sont frits, les poissons séchés bouillis ou au gril, les tendres frits ou (37) assez peu bouillis.

Chez les quadrupèdes, les viandes blanches sont les meilleures ; les morceaux qui renferment plus de sang, cœur, foie, rognons,