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LES BELLINI.

foncier l’école de peinture la plus féconde de la Renaissance.

Suivant une tradition transmise par Vasari, le jeune Bellini se serait immédiatement attaché à Gentile. Il l’aurait suivi à Florence, en 1420, et aurait séjourné avec lui, dans cette ville, jusqu’en 1423 [1].

Mais nous possédons de meilleures preuves des relations que Jacopo eut avec son maître. Au xvie siècle, un Padouan, Pietro Bembo, possédait un portrait de Gentile de la main de Jacopo. De plus, ce dernier, au lieu de donner à son premier-né le nom du grand-père, comme c’était alors l’usage, lui donna celui de Gentile, et baptisa sa fille Niccolosia. Enfin, l’inscription tracée par Jacopo, au bas de la grande Crucifixion qu’il peignit à Vérone, en 1429, nous a été conservée : le peintre s’y déclare, avec fierté, l’élève de Gentile da Fabriano.

Même si ces divers témoignages n’existaient pas, le seul examen des livres d’esquisses de Jacopo suffirait à établir

  1. Ici se place un document des archives florentines qui, selon les uns, confirme, suivant les autres, infirme les dires de Vasari. Le 11 juin, quelques enfants ayant jeté des pierres dans la cour où Gentile remisait ses tableaux, un certain Vénitien, du nom de Jacopo, s’arma d’un bâton et les rossa d’importance. Or, parmi ces enfants, se trouvait le fils d’un notable de la ville qui porta plainte. Jacopo, ayant pris le large, fut condamné par défaut à une forte amende. Dès son retour à Florence, il fut appréhendé et jeté en prison : comme il ne pouvait payer l’amende, il demanda que sa peine fût commuée en une pénitence publique. Cette requête lui ayant été accordée, il se rendit, au milieu d’un grand concours de peuple, le 8 avril 1425, jour de l’Ascension, à l’église de San Giovanni {aujourd’hui le Baptistère), précédé d’un héraut sonnant de la trompette, tête nue, pieds nus et cierge en main.

    Un point seulement manque à ce récit pour qu’il puisse s’appliquer à notre homme. Le Vénitien en question y est appelé « Jacopo, fils de Pietro », alors qu’il eût fallu « Jacopo, fils de Niccolo ».