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petit village, et nous fûmes obligés de camper extra-muros. Hamis était déjà établi quand j’arrivai. Je mourais de soif et de chaleur ; il eut pitié de moi, et me fit entrer dans sa lente pour me donner un sorbet ; celui-ci malheureusement était sucré au point que, au lieu de me désaltérer, il augmenta ma soif. Je n’en fus pas moins touché de la bonne intention.

En amont de Kiroka, les montagnes continuaient à enclore la vallée, d’où nous sortîmes à l’ouest, par une gorge située à quelque hauteur. Engagé dans la passe, le chemin suivit le bord d’un lit de torrent de plus de vingt pieds de profondeur, aux berges presque verticales, et où tomba l’un de nos ânes, qui était chargé d’une caisse de munitions du poids de cent quarante livres. Cette caisse précieuse — elle renfermait nos balles explosibles — fut heureusement repêchée saine et sauve. Le baudet lui-même n’eut aucun mal, bien qu’il fût tombé sur la tête ; une petite place du front, où le poil avait été enlevé, témoignait seule de la chute qu’il avait faite.

Dans la dernière partie de la gorge, le sentier se déroula sur des rochers de grès et de quartz, où il fut très glissant, et passa entre des falaises dont les sommets, qui nous dominaient de trois cents pieds, étaient couronnés d’arbres ; puis un versant rapide, revêtu d’une argile rouge et grasse, nous ramena dans la vallée du Longérenngéri.

Bornée au sud par les montagnes de Kigammboué, d’où se précipitent de nombreux torrents, qui vont grossir la rivière, la vallée était flanquée au nord d’une série de cônes détachés. Elle est extrêmement fertile et présente une heureuse alternance de jungles, de grands bois, d’herbages et de cultures ; mais les torrents des monts Kigammboué diminuent sérieusement ces avantages par leur menace permanente à la sécurité des habitants.

L’un de ces cours d’eau torrentiels, le Mohalé, doit avoir plus d’un mille de large dans la saison des crues ; même à l’époque où nous l’avons traversé, plusieurs ruisseaux de deux pieds de profondeur fuyaient entre les fourrés de bambous qui sillonnaient le lit du torrent.

Après avoir couché dans un village appelé aussi Mohalé, et qui est bâti près de la rivière, nous arrivâmes le lendemain matin à Simmbaouéni, l’ancienne résidence de Kisabenngo, qui fut la terreur de toutes les tribus voisines.