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Les heures suivantes nous virent ramper sur les rocs, traverser des creux changés en étangs par les pluies, et devenus des bourbiers où la fange nous arrivait à la ceinture.

J’avoue que ce fut un soulagement pour moi quand, vers quatre heures, mes hommes déclarèrent qu’ils ne pouvaient pas aller plus loin. Sachant qu’avancer était pour nous d’une importance vitale, j’aurais hésité à parler de repos ; mais je me sentais si faible, que j’étais heureux d’être contraint à faire halte.

L’un de mes gens et un homme appartenant à Manoël pouvaient encore marcher. Nous les expédiâmes à la côte avec un mot, priant quelque personne charitable de nous envoyer des vivres. Je mangeais ensuite ma dernière bouchée de damper, et m’endormis avec la pensée de tenter le lendemain un dernier effort.

Un peu réconfortés par le repos, nous continuâmes à nous traîner dans la passe jusqu’au milieu du jour. Les rayons du soleil, réfléchis par le roc, donnaient à cette gorge une température accablante. Sortis de cette fournaise, nous fîmes halte à un détour de la Soupa, qui charrie les eaux du défilé et rejoint la mer à Catombéla.

M’étant déshabillé pour prendre un bain, je fus très surpris de me voir couvert de taches rouges ; en outre, une écorchure que je m’étais faite à la cheville s’était envenimée, développée et changée en ulcère d’un très mauvais aspect. Ma surprise augmenta lorsqu’en allumant ma pipe, seul déjeuner que je pusse faire, je vis que ma bouche saignait.

La marche fut reprise à travers une plaine rocailleuse et sans eau, qui nous séparait des montagnes situées derrière Benguéla ; puis, sur des monts calcaires aux pentes abruptes, que l’Océan peut avoir baignées, et qui renferment un grand nombre de fossiles, entre autre d’énormes ammonites ; falaises entrecoupées de ravins où il fallait descendre et remonter, grimpant dans l’ombre, roulant et nous meurtrissant. Mais qu’importaient fatigue et contusion ? le lendemain nous serions à Catombéla.

Au fond d’un lit de torrent, nous trouvâmes de l’eau, qui pour moi fut une aubaine ; il y avait longtemps que je n’en avais plus, et ma bouche saignait toujours.

Une nouvelle escalade nous conduisit presque au sommet de la dernière rampe, à un endroit à peu près de niveau, où des