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Nous nous arrêtâmes pour la nuit au sommet d’un tertre. Les cabanes des hommes furent disposées de manière à former une enceinte. On dressa nos tentes au milieu du cercle, où l’on éleva une grande hutte, qui servit de magasin et de corps de garde. Avant le coucher du soleil, on attacha les ânes dans l’intérieur du camp, et l’entrée de celui-ci fut close : précaution prise à la fois contre les bêtes féroces et les voleurs.

À l’arrivée de la caravane au lieu du bivouac, les hommes se divisaient par kammbis ou chambrées de trois à sept individus. Dans chaque groupe, l’un des membres était choisi pour faire la cuisine, tandis que les autres bâtissaient les abris.

Par l’effet de cette division du travail, dans tous les endroits où l’herbe est abondante et le bois convenable, le camp s’établit avec une rapidité merveilleuse. L’un des ouvriers apporte une perche qui formera l’arête de la toiture, et prend la direction de la bâtisse. Les autres préparent les fourches qui soutiendront la poutrelle, coupent des baguettes pour en faire des solives, fournissent l’écorce avec laquelle seront liées les pièces de la charpente, et l’herbe dont on fera la couverture et la literie.

À l’intérieur de la hutte, chaque brin d’herbe est soigneusement arraché ; une couche d’herbe, couche épaisse, est étendue par terre, et constitue une espèce de sommier sur lequel sont posées les nattes. Quelques individus plus délicats se font, avec des branchages, une petite couchette qui les préserve de l’humidité du sol.

En moins de deux heures l’aménagement est complet. Chaque groupe se met à diner, puis va dormir jusqu’au repas du soir, qui a lieu au coucher du soleil. Après le souper on fume, on jase, et à huit ou neuf heures, à peu d’exceptions près, tout le monde rentre dans les cabanes et s’endort. Parfois un éveillé, pensant avoir quelque chose d’important à dire à son tchoum (son ami), qui gîte de l’autre côté du bivouac, interpelle son camarade à pleins poumons et continue ses hurlements jusqu’à ce qu’il ait obtenu une réponse ; généralement ses cris lui ont fait oublier ce qu’il voulait dire, et il a mis tout le camp en émoi pour rien.

Après deux jours de marche en même pays, les guides nous conseillèrent de faire halte pour nous ravitailler. Je partis donc avec Bombay et un certain nombre d’hommes pour un village que l’on disait être voisin, laissant à Dillon la surveillance du