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Méricani, un tapis superbe qui me rendait grand service.

Toute la journée je fus en proie aux regards de la foule ; quand l’averse m’obligea à rentrer dans ma case, les curieux ne se firent aucun scrupule de me suivre, et il devint nécessaire de se garer des pick-pockets.

Parmi les indigènes, se trouvaient des membres d’une caravane appartenant à Mchiré et qui revenait de Benguéla. Tous portaient les marques nationales des Vouanyamouési ; Mchiré a donné l’ordre à tous ses sujets d’adopter ces marques particulières, et beaucoup de gens du Bihé, qui visitent le Katannga, se sont conformés à l’ordonnance pour obtenir la faveur du chef. La plupart des membres de ladite caravane parlaient kinyamouési ; l’un d’eux se prétendait même natif de l’Ounyanyemmbé ; mais il était du Katannga, et avait seulement visité la province dont il se disait originaire. Pour moi, il n’est pas douteux que les gens de Mchiré ne visitent les deux rivages, et que, par leur entremise, on ne puisse envoyer des dépêches de Benguéla à Zanzibar.

Le lendemain matin, vers neuf heures, Kagnommbé était prêt à me recevoir, il me l’envoyait dire. Je me fis aussi beau que le permettait la pénurie de ma garde-robe : et prenant avec moi six de mes serviteurs, je gagnai le ravin au bord duquel était la résidence du chef.

Des sentinelles, ayant des gilets rouges et armées de lances et de couteaux, gardaient la porte. Dans la cour, de petits tabourets, placés sur deux rangs, attendaient les invités. Au bout de ces deux files d’escabeaux était le fauteuil royal, posé sur ma peau de léopard.

Ne voyant pas qu’on m’eût assigné de place particulière, et n’étant pas d’humeur à prendre pour siège un tabouret du même niveau que celui de mes hommes, j’envoyai chercher ma chaise. Les officiers de la cour s’y opposèrent, disant que personne ne s’était jamais assis sur une chaise en présence de Kagnommbé, et que l’on ne pouvait pas me permettre d’introduire une pareille mode. Je répondis que cela m’était fort égal, que je me retirais, et n’avais pas besoin de siège ; sur quoi ma chaise fut admise immédiatement.

Quand tout le monde fut placé, on ouvrit la porte d’une palissade intérieure, et le chef apparut. Il avait un vieux pantalon et un vieil habit noirs, mis n’importe comment, et sur les épaules,