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situées à une cinquantaine de milles au sud de Loupannda, fut apportée au camp pour y être échangée contre des esclaves. Le métal arrivait sous forme de hannda, cette croix de Saint-André que nous avons décrite page 227. La charge était composée de deux ballots, formés chacun de neuf ou dix croix et suspendus aux deux bouts d’une perche.

Prenant un de ces ballots, qui pesait soixante livres, je le tins à bras tendu. Les spectateurs furent très étonnés ; ils déclarèrent qu’il avait fallu une grande médecine pour me rendre capable d’un pareil exploit. Quelques indigènes et plusieurs des gens d’Alvez mirent leur force à l’épreuve ; un de mes porteurs parvint à tenir six hanndas ; mais pour les autres, le maximum fut de cinq. C’était, il est vrai, la première fois qu’ils essayaient de porter quelque chose à bras tendu ; et je ne doute pas que beaucoup d’entre eux ne l’eussent emporté sur moi dans d’autres exercices. Néanmoins, je pense que, en général, la force musculaire des noirs est inférieure à celle des blancs.

En sortant de Loupannda, nous entrâmes dans un marais dont la traversée occupa une journée entière De nombreux cours d’eau sillonnaient cette vase profonde ; ils étaient couverts de tinnghi-tinnghi, sur lequel nous passâmes, allant d’île en île, et finissant par camper dans un îlot rempli de grands arbres. C’est dans ce vaste marais que le Lomâmi et le Louhouemmbi prennent leur source. Parties du même point, ces deux rivières s’unissent en aval de l’Iki ou lac Tchébonngo, le Lincoln de Livingstone, que traverse le Louhouemmbi.

Pendant cette marche, je vis une harde de petites antilopes et réussis à tuer un de ces animaux après une longue et patiente rampée. Laissant mes hommes dépouiller la bête, je continuai à poursuivre le troupeau dans l’espoir d’abattre une seconde antilope. Quand je revins, il y avait querelle entre mes gens et ceux de Bihé, qui prétendaient avoir la moitié de l’animal, la troupe ayant été signalée par un des leurs. Je réglai l’affaire en disant que celui qui avait annoncé la harde recevrait une petite part de viande ; mais que les autres pouvaient aller se promener. J’envoyai à Alvez un morceau de venaison ; au lieu de me remercier, le vieux chenapan en réclama davantage, sous prétexte que la caravane étant à lui, tout le gibier qu’on tuait devait lui être apporté pour qu’il en fit la distribution.