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J’appris également une foule d’histoires qui, malgré leur apparence fabuleuse, m’ont été certifiées par différents témoins, et qui, je n’en doute pas, étaient acceptées comme absolument vraies par les narrateurs.

De ces histoires, celle qui peut-être mériterait la palme nous fut contée par un natif de l’Oukarannga. Il nous assura que les gens d’un village voisin de celui qu’il habitait vivaient dans les meilleurs termes avec les lions. Ces animaux, disait-il, se promènent parmi les cases sans jamais faire de mal à personne. Les jours de fête, on les régale de miel, de chèvre, de mouton, et quelquefois, dans ces assemblées tambourinantes, dansantes et mangeantes, on voit jusqu’à deux cents lions réunis. Chacun de ces animaux à un nom connu des habitants et répond quand on l’appelle. Enfin, lorsqu’un de ces lions vient à mourir, les villageois pleurent sa perte et se lamentent comme pour un des membres de leur famille.

L’endroit où se passerait le fait est situé au bord du Tanganyika, à peu de distance de l’établissement de Méricani. Mon hôte avait souvent entendu parler de l’intimité des gens de ce village avec les lions, mais n’avait jamais assisté aux fêtes où ces animaux étaient rassemblés. Quant au narrateur, il assurait avoir été témoin de ces relations amicales, et m’amena plusieurs de ses compatriotes qui me certifièrent la vérité de ses paroles.

Une autre histoire offre une curieuse analogie avec ce que l’on raconte de l’upas. Il y a dans l’Ourgourou, province de l’Ounyamouési, trois grands arbres dont les feuilles, larges et lisses, sont d’un vert foncé. Une caravane, composée de Vouarori, pensa qu’on devait être bien sous leur voûte, et le camp y fut dressé. Le lendemain matin, tous ces Vouarori étaient morts. Leurs squelettes et l’ivoire qu’ils portaient sont toujours là pour témoigner de l’événement.

Djoumah Méricani avait vu ces arbres ; il m’assura que pas un oiseau ne perchait sur leurs branches, que pas un brin d’herbe ne croissait à leur ombre. Les hommes qui l’avaient accompagné dans l’Ourgourou me confirmèrent son assertion dans tous ses détails.

Mon hôte me dit également que dans les environs de Mfouto, village de l’Ounyanyemmbé, une figure d’homme assis sur un tabouret, ayant près de lui un tambour, un chien et une chèvre, était sculptée dans le roc. Il ajouta que les Arabes lui avaient