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huttes éparses, bâties sur pilotis, s’élevaient au-dessus de l’eau. Je priai le chef du village où nous étions de me procurer des pirogues. Il me dit qu’il essayerait d’en obtenir des habitants du lac, lui n’en ayant pas, non plus que ses sujets ; mais il déclara qu’il serait très difficile de réussir, les gens du Mohrya ne voulant point de visiteurs.

Il avait raison : je n’eus pas de canots, et il fallut me contenter d’un examen télescopique. À l’aide de ma longue-vue, je distinguais facilement les villages ; j’en pris un croquis, et fis avec soin le relèvement des bords du lac.

Les habitations, bâties sur des plates-formes construites sur pilotis, s’élevaient à six pieds au-dessus de la surface de l’eau. Quelques-unes de ces demeures étaient carrées, les autres de forme ronde. La toiture et les murailles paraissaient faites de même que celles des cases du rivage.

Sous les plates-formes, des canots étaient amarrés, des filets suspendus. Bien que j’eusse entendu dire qu’il y avait dans le lac d’énormes serpents, dont la morsure était fatale, on voyait des hommes aller à la nage d’une maison à l’autre.

Les gens du Mohrya n’ont pas d’autres demeures que ces habitations lacustres ; ils y vivent avec leurs chèvres et leurs volailles, ne quittent jamais le lac que pour cultiver les champs qu’ils ont sur la rive, faire leurs récoltes, et mener les chèvres au pâturage.

Leurs bateaux sont des pirogues de vingt à vingt-cinq pieds de longueur ; ils les conduisent avec des pagaies à long manche et dont la pelle, large et circulaire, est creuse.

N’ayant aucune chance d’obtenir des canots, je repris le lendemain la route de Kilemmba. Des hommes du lac travaillaient dans les champs ; j’essayai d’entrer en conversation avec eux ; mais ils coururent à leurs pirogues, qui étaient proches, et s’éloignèrent. Nous les suivîmes sur le tinghi-tinghi, — tapis d’herbes flottantes, — cherchant à les faire revenir en leur montrant de l’étoffe et des perles ; rien ne put les attirer, et il me fallut renoncer à tout espoir de mieux connaître leurs habitudes.

Deux étapes nous firent regagner Kilemmba ; la seconde eut lieu sous une averse qui commença dix minutes après notre départ et ne cessa qu’à notre arrivée.

Nous avions bivouaqué le premier soir près de l’ancienne rési-