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nières réellement distinguées. Je lui ai montré un miroir : c’était le premier qu’elle voyait ; elle en fut un peu effrayée, mais n’osa pas témoigner sa frayeur ; il en résulta une scène amusante.

« Elle aime beaucoup la parure ; outre les ornements de cuivre, de fer et d’ivoire qu’elle porte dans les cheveux, elle a, de chaque côté de la tête, retombant devant l’oreille, un petit gland de perles rouges et blanches. Son cou est entouré d’un large collier de coquillages ; un rang de ces grosses perles opalines nommées sinngo-mazzis lui serre la taille, et une torsadé de fils de grains de verre d’un rouge sombre soutient les deux tabliers qui l’habillent. Le plus petit de ses tabliers, celui de devant, est en peau de léopard ; l’autre est fait d’un tissu d’herbe frangé de grains de verre et de cauris, enfilés sur chacun des brins de la bordure, où ils forment un dessin régulier. Elle porte aux chevilles des anneaux de fer poli ; aux bras, des anneaux de cuivre et d’ivoire. Un peu de sa chevelure a été rasée de manière à hausser le front, dont la partie supérieure est décorée de trois lignes de peinture d’un quart de pouce de large ; la première de ces bandes, celle qui touche à la racine des cheveux, est rouge ; la seconde est noire, la troisième blanche. Enfin, quand je l’ai vue, la dame était revêtue des pieds à la tête d’une couche fraîche d’huile de mpafou, qui lui rendait la peau brillante et parfumée »

Les classes supérieures de l’Ouboudjoua portent le même costume, les mêmes ornements, le même tatouage que les Vouaroua et les Vouagouhha, et semblent appartenir à la même race.

Les gens du peuple, qui, autant que je puis le croire, sont les aborigènes, diffèrent complètement des notables par le costume et par les traits. Leurs femmes se font dans la lèvre supérieure un trou qu’elles agrandissent peu à peu, en y insérant d’abord des chevillettes, puis des morceaux de bois ou de pierre, jusqu’à faire saillir la lèvre d’un pouce et demi à deux pouces, ce qui les défigure d’une façon hideuse et les empêche de parler distinctement[1].

Pour costume, elles ont d’un à trois coussinets de cuir, faits

  1. Cette hideuse coutume est très répandue en Afrique ; elle existe sur les bords du Zambèse inférieur, sur les rives du Chiré et du lac Nyassa, où le bijou inséré dans la lèvre est une bague nommée pélélé. On retrouve celui-ci parmi les riverains de la Rovouma, chez qui il est même porté par quelques dandys, bien que cette parure soit essentiellement féminine ; enfin l’ornement labial, sous forme de cheville, de