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chose qui ressemblât à des idoles. J’ai vu là, également pour la première fois, des indigènes porter au cou une amulette sculptée, figurine à tête humaine, dont le corps, de forme conique, était paré d’anneaux et avait jusqu’à trois jambes. Un trou pratiqué dans le cou de l’image permettait d’y passer le cordon au moyen duquel on suspend cette amulette.

Ce fut le 3 mai 1874 que, par une brise fraîchissante venant de l’est, je mis à la voile avec l’espoir de me trouver quelques heures après dans le Loukouga. Il allait être midi lorsque nous y arrivâmes. Je vis une entrée de plus d’un mille de large, mais fermée aux trois quarts par un banc de sable herbu. Un seuil traverse même ce passage ; parfois la houle vient y briser violemment, bien que dans sa partie la plus haute, il soit couvert de plus de six pieds d’eau.

Le chef, dont je reçus la visite, me dit que la rivière était bien connue de ses sujets ; ils en avaient fréquemment suivi les bords pendant plus d’un mois, ce qui les avait fait arriver au Loualaba, et leur avait fait voir que le Loukouga recevait le Louloumbidji et une grande quantité de petits cours d’eau.

« Nul Arabe, ajouta le chef, n’a descendu la rivière ; les marchands ne viennent pas chez moi : pour avoir de l’étoffe et des perles, il faut que j’envoie dans l’Oudjidji. »

Le lendemain matin, il plut à verse ; malgré cela, accompagné du chef, je descendis le Loukouga jusqu’au point où l’amas de végétation flottante nous empêcha d’aller plus loin ; toutefois des canots auraient pu s’ouvrir un passage.

Nous étions alors à quatre ou cinq milles de l’entrée. La rivière avait là trois brasses de profondeur, six cents yards de large, une vitesse d’un nœud et demi, et un courant d’une force suffisante pour nous faire entamer le bord du radeau végétal.

Ce premier amas, d’une étendue de quatre à cinq milles, était suivi, disait-on, d’une eau libre de même longueur ; et cette alternance de parties encombrées et de canaux dépourvus d’herbe se continuait jusqu’à un endroit fort éloigné.

Les embouchures des petits cours d’eau que, pendant notre descente, nous vîmes se jeter dans le Loukouga, étaient incontestablement à l’opposé du lac, et les herbes flottantes suivaient toutes cette direction contraire.

En aval, le dattier sauvage formait sur les rives d’épais fourrés.