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pour le commencement d’un brise-lames fait par quelque race de titans.


Homme de Massé Kammbé.

Le lendemain matin de bonne heure, comme nous venions de mettre à la voile, les montagnes situées au couchant du lac me parurent avoir le sommet couvert de neige. Tandis que je les regardais fixement avec ma lunette, leur blancheur s’évanouit et je reconnus la cause de mon illusion : les rayons presque horizontaux du soleil levant avaient été réfléchis par le bord inférieur des nuages, qui reposaient à la cime des monts, et avaient formé à ceux-ci une coiffe lumineuse que l’ombre des pentes, encore obscures, avait fait paraître d’une blancheur étincelante. Il est possible que maint rapport, au sujet de la couronne neigeuse de certaines montagnes, n’ait pas d’autre fondement que cet effet d’optique.

Au large du cap Mpimmboué, se trouvaient de nombreux récifs, qui, à demi hors de l’eau, rendaient la navigation dangereuse.

Vers midi, nous nous arrêtâmes sur la côte septentrionale de la pointe de Kammbemmba, où le bivouac fut dressé. Peu de temps après, des cris jetés par mes hommes me firent prendre mon raïfle et sortir de ma tente : un buffle s’était approché du camp ; mais, effarouché par le bruit qu’il avait fait naître, il s’enfuyait à toute vitesse.

En remettant mon raïfle à sa place, contre le pilier de ma tente, je fis partir mon fusil qui était suspendu à la même perche. J’avais la tête près de la bouche du canon ; instinctivement je fis un bond en arrière et tombai sur le coin de mon lit, où je fus pris d’étourdissement.

Je crus d’abord m’être blessé avec le fusil ; mais en entendant mon domestique crier : « Bouana amepigoua ! » — Maître est tué ! — je repris mes sens et ne me trouvai qu’une déchirure à la peau du crâne, résultat de ma chute, déchirure moins fâcheuse que le trou fait par le coup de feu au sommet de ma tente, à