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en flagrant délit de vol ; et le renvoyant sur l’heure, je lui dis que, si on le retrouvait près de mon habitation, il serait arrêté et fouetté de nouveau.

Mon premier soin avait été de m’enquérir des papiers de Livingstone ; j’avais appris avec joie qu’ils étaient sous la garde de Mohammed Ibn Sélim, qui, bien que n’ayant pas de titre officiel, était considéré comme chef de la colonie, où il remplissait bénévolement les fonctions d’arbitre, je pourrais dire de juge.

Par contre, le résultat des informations que je pris, relativement à la suite de mon voyage et à l’envoi des papiers de Livingstone à la côte, fut loin d’être encourageant. On m’affirmait qu’à l’ouest du Tanganyika le pays ne serait pas praticable avant trois mois, au plus tôt ; on me disait, d’autre part, que rien n’était moins sûr que l’arrivée à la côte d’un parti peu nombreux, en raison des troubles qu’il y avait sur la route ; et l’on me conseillait de placer mes envoyés sous la protection d’une caravane imposante.

Je résolus donc, en attendant pour les papiers une occasion favorable, pour moi le moment du départ, d’explorer la partie sud du Tanganyika ; et je fis sur-le-champ les préparatifs de cette croisière.

Mais avant d’aller plus loin, parlons un peu de Kahouélé et de ceux qui l’habitent. La situation est admirable, la vue du lac est splendide : à l’ouest, les montagnes de l’Ougoma ; sur la rive orientale, une végétation épaisse d’un vert éclatant, avec çà et là des clairières, où apparaissent des grèves au sable jaune et de petites falaises d’un rouge vif. Des bouquets de palmiers, des villages entourés de verdure, descendent jusqu’au bord de l’eau, et des mouettes, des plongeons, des anhinngas, des martins-pêcheurs, de nombreuses pirogues, des îles flottantes, qui, de loin, ressemblent à des bateaux sous voiles, animent la scène.

Devant ce magnifique décor, sur la place de Kahouélé qui touche au rivage, se tiennent tous les jours deux marchés : l’un de sept heures et demie à dix heures, l’autre dans l’après-midi.

Celui du matin, qui est le plus considérable, offre un tableau à la fois plein de vie et d’intérêt. Il est fréquenté par les gens de l’Ougouhha, de l’Ouvira, de l’Ouroundi et autres lieux des bords