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faiblesse où m’avaient mis non seulement la fièvre, mais les effets de la cuisine de Sammbo, qui, dans la pâte des galettes de mon déjeuner, avait remplacé le beurre par de l’huile de ricin.

Pendant cette halle, nous apprîmes que Mirammbo avait encore détruit deux villages. Cependant, d’après tous les rapports, il n’avait pas avec lui plus de cent cinquante hommes. Si tous les gens du pays avaient voulu s’entendre, ils l’auraient facilement battu ; mais chaque village était en querelle avec ses voisins, et, dans leur isolement, tous devenaient la proie de l’ennemi l’un après l’autre.

Nous allâmes ensuite à Longohoua. Pour nous y conduire, le chemin nous fit traverser des marais d’où l’on extrait du sel de la manière suivante : une certaine quantité de boue salifère est placée dans une auge, ayant au fond un trou carré, bouché en partie avec des morceaux d’écorce. Sous cette auge, qui seule contient la fange saline, s’échelonnent une demi-douzaine de vaisseaux exactement pareils. On verse de l’eau chaude dans le premier vase, pour dissoudre le sel dont la boue est imprégnée ; le liquide se filtre en passant dans les paquets d’écorce, qui ferment les trous des récipients, et sort du dernier vase à peu près clair. On le fait ensuite bouillir jusqu’à évaporation complète, et l’on a un très bon sel blanc, le meilleur que j’aie rencontré en Afrique.

Si la première ébullition ne donne pas un sel d’une qualité suffisante, le produit est dissous de nouveau et refiltré jusqu’à ce qu’il ait acquis la pureté voulue.

Toute la région du lac Victoria, tout le pays qui borde la moitié méridionale du Tanganyika, une grande partie du Manyéma, et jusqu’au sud du Rouaha, sont approvisionnés par les salines de l’Ouvinnza.

Il y a dans ces contrées des salines que l’on exploite ; mais le sel de l’Ouvinnza est tellement supérieur qu’il y est toujours d’une vente facile.

Au moment du départ, le vieux chef me fit don d’une charge de sel, générosité que je reconnus par un présent dont il parut satisfait.

C’est à Lougohoua que je fus témoin, pour la première fois, d’une façon très curieuse de priser, et qui est fort répandue dans l’Oudjidji. Au lieu de prendre le tabac en poudre, suivant la méthode ordinaire, les priseurs s’en administrent l’infusion.