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et en lançant les jambes à droite et à gauche, afin de signale son approche par le tintement de ses bijoux.

Le père de Liohoua, qui portait le même nom, avait été chef de tout l’Ougara. Un jour, après s’être querellé avec des Arabes, il était parti pour Bagamoyo, qu’il voulait détruire de fond en comble ; mais il était mort pendant le voyage, ainsi que la plupart de ses compagnons. Son fils lui avait succédé ; profitant de la jeunesse de celui-ci, les gouverneurs des deux autres provinces de l’Ougara s’étaient déclarés indépendants, et le Liohoua actuel avait perdu de la sorte les deux tiers de son patrimoine.

Je reçus de lui une petite chèvre qui se montra si affectueuse que je n’eus pas le courage de la faire tuer. Elle me connut bientôt et répondit à mon appel ; je la nommais Dinah. Elle et mon chien étaient deux inséparables ; en route, ils me suivaient côte à côte, ne s’éloignant pas de mes talons.

Pendant que nous étions chez Liohoua, arrivèrent des hommes de Mrima Ngommbé, qui se rendaient chez Simmba. Ce dernier l’un des chefs de l’Ourori, ayant pris récemment une quantité considérable d’ivoire à des gens de son voisinage, avait envoyé des messagers dans toutes les directions annoncer qu’il avait en magasin un stock énorme de dents d’éléphant de qualité supérieure. Sur le point de partir, il voulait se débarrasser de ce magnifique ivoire, et déclarait que, pour cela, il ferait un sacrifice ruineux. C’était pourquoi les gens de Ngommbé allaient chez Simmba. Le lendemain matin ils étaient en route.

Sur-ces entrefaites, le bruit courut que de nombreux esclaves mis sur le pied de guerre par les Arabes pour combattre Mirammbo avaient pris la fuite et rejoint les bandits qui infestaient les environs de l’Ounyanyemmbé. Ces esclaves, qui avaient tourné leurs armes contre leurs anciens maîtres, attaquaient indistinctement quiconque pouvait leur fournir une occasion de pillage, et fermaient, disait-on, la route qui conduisait au bac du Malagaradzi. Beaucoup des atrocités que l’on attribuait à Mirammbo devaient être portées à l’actif de ces brigands, qui, n’étant retenus par aucune loi humaine ou divine, ne mettaient pas de borne à leur scélératesse.

Le 17 janvier, comme nous venions de quitter le village de Liohoua, nous rencontrâmes les gens de Mrima, qui, partis la veille, revenaient se mettre sous notre protection, n’osant pas voyager seuls.