Page:Cameron - A travers l'Afrique, 1881.pdf/164

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ment de différentes époques. La partie la plus ancienne, qui renfermait la résidence du chef, était bâtie presque tout entière sous un énorme figuier banian.

En surplus de l’estacade, il y avait un fossé avec contrescarpe, où étaient percées des meurtrières pour la mousquetade ; et l’on n’entrait dans la place que par des couloirs ayant chacun deux ou trois portes.

Quel changement dans la contrée depuis le passage de Burton ! En 1857, un mousquet était l’héritage d’un chef, et les heureux possesseurs de cette arme précieuse ne se rencontraient que de loin en loin. Lors de ma visite, presque tous les villages pouvaient montrer au moins la moitié de leurs guerriers munis d’armes à feu.

Par suite de la guerre qui avait éclaté entre Mirammbo et les Arabes, tout le pays était troublé. Les gens sans frein des villages profitaient de cet état de désordre pour former des bandes de quarante à cinquante individus, qui allaient mettre à sac les bourgades voisines, et attaquaient les faibles sans distinction, se disant alliés de Mirammbo ou des Arabes, selon le parti auquel appartenaient ceux qu’ils voulaient piller.

Comme il y avait à craindre de ne pas trouver d’eau en suivant les indications de la boussole, je pris la route que désignait Asmani. Bientôt sortis des jungles, nous entrâmes dans une plaine qui paraissait illimitée ; nous y dressâmes le camp, près d’un étang fangeux, sur une des éminences couvertes d’arbres qui s’y trouvaient en grand nombre.

Cette plaine était singulièrement giboyeuse ; nous y vîmes des cailles, des secrétaires, de grandes hardes d’antilopes, et j’y traversai une piste de buffles d’environ vingt mètres de large, énorme sillon creusé en droite ligne du nord au sud.

Le lendemain, nous dirigeant vers le Ngommbé méridional, nous passâmes auprès d’étangs marécageux entourés d’arbres et de broussailles. J’étais en avant de la caravane, malheureusement sans mon fusil, quand un énorme rhinocéros blanc sortit du hallier à quelques pas de moi. Je me glissai derrière un arbre sans qu’il m’eût aperçu. Il continua à flâner en grognant jusqu’à l’arrivée des porteurs, dont les cris le firent rentrer dans la jungle. Aussitôt que j’eus mon raïfle, je me mis sur les traces de la bêle, et les suivis assez loin ; mais elles me conduisirent à une fondrière qui termina la poursuite.