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Le soleil disparut, et il était près de huit heures quand nous découvrîmes le reste d’un étang fangeux, boue liquide dont il fallut nous contenter.

Nous avions évidemment été trompés par les indigènes, qui l’avaient fait à plaisir, et notre guide avait eu raison d’insister pour s’arrêter près du village ; nous étions obligés de le reconnaître.

Le lendemain matin, peu de temps après le départ, une eau passablement claire fut aperçue dans l’une des cavités d’un lit de granit. À l’instant même, les pagazis jetèrent leurs charges ; et en un clin d’œil une masse confuse de créatures humaines, de chiens et d’ânes, couvrit l’abreuvoir, tous buvant à la fois.

On peut se faire une idée de notre vie quotidienne par ces quelques pages de mon journal :

« 28 juillet 1873. — Partis à sept heures pour Ki Sira-Sara, où nous sommes arrivés à onze heures et quart.

« Toujours le même pays : çà et là de grands rochers sur un fond sableux ou sur un terreau noir qui, l’un et l’autre, reposent sur le granit. Des bois sans fourré ; de temps en temps de petites plaines découvertes. Beaucoup de pistes ; aucun gibier visible.

« En sortant du bivouac, nous avons trouvé de l’eau dans une nappe de granit. Quel bienfait si nous avions connu plus tôt ce bassin ! L’eau que nous avons bue hier était si épaisse que nos gens, par dérision, l’appelaient du pommbé.

« Presque plus d’herbe dans la forêt ; elle a été brûlée ; tous les camps ont subi le même sort. Les caravanes se remettent en marche sans éteindre leurs feux, la moindre brise transporte les étincelles, et jusqu’au loin l’herbe est en flammes. On traverse des milles et des milles sur un lit de cendre aussi noir que le — je ne peux pas dire que mon chapeau ou mes bottes : l’un est blanc, les autres sont brunes.

« Un de nos baudets est mort cette nuit d’une fièvre lente, qui semble particulière aux ânes de la côte. Ceux de l’Ounyamouési vont à merveille.

On supposait qu’à l’endroit où nous sommes l’eau était rare ; mais en creusant aux environs des tentes, nous en avons trouvé a deux pieds de profondeur. J’imagine que, dans ce pays-ci, elle repose de tous côtés sur le granit, qui partout est près de la surface du sol ; la quantité d’eau du ciel que n’enlève pas l’éva-