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Dillon et moi nous prîmes les devants avec l’espoir de nous mettre en chasse ; mais les gens du voisinage avaient fait une battue, et bien qu’on vit partout des pistes fraîches de buffles et d’antilopes, il ne restait plus de gibier.

Nous fîmes dresser le camp au bord d’un petit zihoua, niché dans l’herbe et couvert de nénufars blancs, rouges et jaunes.

Comme les bœufs n’étaient pas chers, j’en achetai un pour nos hommes. La bête échappa à ceux qui l’amenaient, prit le galop et s’enfuit d’une course furieuse ; il fallut la chasser et la tuer à coups de fusil.

C’était vers le Djihoué la Sinnga, la Roche à l’herbe molle, que nous nous dirigions le lendemain. La route traversait un défrichement qui s’étendait à perte de vue et dans lequel se trouvaient des villages populeux, de nombreux troupeaux, de grands espaces cultivés.

Tous les villages étaient pourvus d’estacade, tous les champs entourés de fossés profonds et de levées bien faites ; à un endroit, nous avons même vu des essais d’irrigation.

La culture de ces champs, soigneusement labourés, doit exiger beaucoup de travail et de persévérance. Tout le sol est d’abord remué à la pioche et mis en larges billons avec la houe, billons qui, pour la prochaine récolte, seront retournés complètement, de telle manière que les ados de l’année deviennent le sillon de l’année suivante.

Pas un des villages dans lesquels nous entrâmes qui ne fût d’une propreté et d’une tenue remarquables. Partout nous vîmes des cases bien faites et d’une construction surprenante, si l’on considère l’insuffisance des matériaux et des moyens dont les ouvriers disposent. En vérité, à part leur ignorance du livre, les habitants de ce district ne sauraient être regardés comme occupant une place inférieure dans l’échelle de la civilisation.

Nous traversions alors la ligne de faîte qui sépare le bassin de Roufidji de ceux du Nil et du Congo.

Retardés par un Kiranngosi stupide, qui nous fit longer les deux côtés d’un triangle, nous n’arrivâmes qu’à deux heures, tandis que ceux de nos hommes qui avaient pris la route directe avaient gagné le camp à midi.

Djihoué la Sinnga est un endroit prospère, où des Vouamrima de Bagamoyo se sont établis comme marchands. Plusieurs de ces derniers vinrent nous voir. Ils nous exprimèrent la haute