Page:Cameron - A travers l'Afrique, 1881.pdf/109

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pour un doti ; avec la même somme, je n’ai jamais pu en obtenir au delà d’une vingtaine, et rarement plus de dix. Les œufs étaient un luxe inabordable ; le beurre, le lait et le miel, d’un prix exorbitant. En n’évaluant le doti qu’au chiffre de Zanzibar, ces denrées étaient plus chères qu’en Angleterre ; et la plus stricte économie devenait indispensable. Perdre un ballot était donc une chose grave. J’envoyai Bilâl avec six soldats à la poursuite du déserteur, et fis requérir le chef du Mdabourou de nous seconder dans notre recherche ; mais efforts stériles : nous ne retrouvâmes ni le voleur ni l’étoffe.

Dans l’après-midi, un chef, accompagné de sa suite, vint nous voir et demeura pendant deux heures accroupi dans ma tente, ce qui n’eut rien d’agréable, le personnage étant couvert des pieds à la tête d’un enduit de beurre rance.

Il me dit qu’ayant été à Zanzibar, il avait déjà vu des blancs et connaissait quelques-uns de leurs usages ; que néanmoins, puisqu’il en était venu dans son pays, il désirait faire avec eux plus ample connaissance et regarder tout ce qu’ils possédaient. Je le mis à même de contenter son désir. Les objets qu’il avait déjà eu l’occasion de voir attirèrent peu son attention ; mais il examina chaque nouveauté avec soin et jusque dans les plus petits détails.

Je lui montrai des images d’animaux ; il en reconnut quelques-uns, et regarda invariablement au dos de la gravure, pour voir ce qui s’y trouvait ; il me dit alors qu’il ne considérait pas ces images comme étant finies, puisqu’elles ne donnaient la ressemblance que d’un côté de la bête.

Il n’en fut pas moins enchanté de sa visite, et décida que nous devions rester dans le pays trois ou quatre jours de plus, afin que ceux qui n’avaient jamais vu d’hommes blancs, et qui désiraient les connaître, pussent venir nous regarder.

Si agréable que fût cette idée pour les indigènes, elle nous parut peu flatteuse. Passer à l’état de ménagerie ambulante, pour le plaisir des Vouagogo, ne nous allait pas du tout. L’entrée n’était pas seulement libre ; elle se faisait à nos dépens, obligés que nous étions par les spectateurs, d’acheter la permission de nous laisser voir.

Comme nous entrions dans le Mdabourou, il y arrivait une caravane appartenant à Séïd Ibn Sélim el Lammki, gouverneur de l’Ounyanyemmbé ; elle portait de l’ivoire à la côte pour en