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« unilinguistes », ils ne comprendraient pas si on leur jetait tout cela à la tête. Elle aura des privilèges, l’Alsace, sur tous ces chapitres, puisqu’elle les avait auparavant. Sa langue sera enseignée dans ses écoles. Et tout cela sera très bien. Nous l’approuverons, nous l’aiderons au besoin à obtenir ou plutôt à conserver ces biens – et nous réclamerons des Pouvoirs le même traitement pour nous. Il y aura, à notre avantage, que nous nous serons fait casser la figure pour reconquérir l’Alsace à la France et la liberté à l’Alsace. Par conséquent la position sera très bonne. L’exploiter habilement.

Ne jamais oublier, du reste, que l’œuvre primordiale, la plus urgente, ce sera d’assurer le salut de la langue. Si nous perdons notre langue, en vingt-cinq ans la Bretagne sera devenue une banale région française, ou plutôt cosmopolite, ayant perdu tout caractère. Si nous la sauvons, le reste nous sera donné par surcroît : autonomie administrative, économique, religieuse, etc. Tout cela sera facile à conquérir quand nous aurons conquis l’école, c’est-à-dire l’âme des enfants, Il n’y aura qu’à avancer la main et à prendre.

Les Breuriez ar Brezoneg[1] du Vannetais et du Trécor, dont Mocaër vous aura parlé sans doute, étaient avant la guerre (avec le théâtre) le seul champ d’action fécond que nous possédions. La guerre est survenue juste au moment où, de concert avec mon maître M. Loth, professeur au Collège de France, et diverses autres personnalités, nous allions élaborer une organisation destinée à étendre ce champ d’action. Mais, si je vis, cela reviendra sûrement sur l’eau à la fin des hostilités. Si je meurs, j’espère que d’autres s’empareront du projet et feront tout pour l’exécuter.

  1. Association fondée en Basse-Bretagne pour apprendre aux petits Bretons à lire la langue qu’ils parlent à leur foyer et qui est proscrite des écoles.