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LE GEÔLIER DE SOI-MÊME.

frédéric.

Et pourquoi donc ne lui as tu pas dit qu’il se couchât dans le lit ?

roberto.

J’ai fait mieux.

frédéric.

Comment ?

roberto.

Je m’y suis couché moi-même.

frédéric.

Puisque cet homme me donne par son sommeil l’occasion que je désire, maintenant, Roberto, écoute. L’infante Marguerite va venir au château à mon intention. Elle s’imagine que c’est moi qui suis le prisonnier, et je tiens à ne pas la détromper en ce moment. Nous verrons ce que cela va devenir, et plus tard je me découvrirai, s’il le faut. — N’a-t-on pas frappé ?

roberto.

Oui.

frédéric.

Eh bien ! va ouvrir[1].

Frédéric s’assied dans un fauteuil.


Entre L’INFANTE.
roberto.

Qui demandez-vous, madame ?

l’infante.

La princesse Hélène m’a permis d’entrer.

roberto.

Le gouverneur m’a ordonné, en effet, de laisser entrer la personne qui se présenterait au nom de la princesse.

l’infante.

Quoi ! c’est toi, Roberto ?

roberto.

Quoi ! c’est vous, madame ? — Et comment votre altesse a-t-elle ose pénétrer jusqu’ici ?

l’infante.

Je suis entraînée par des sentimens plus forts que moi. — Et ton maître ?

roberto.

Le voilà assis, et il se tient toujours de même dans ce coin ; jamais on n’a vu pareille tristesse. Aussi je crains qu’il ne meure de

  1. Nous étions tout à l’heure dans le parc, et tout-à-coup nous voilà transportés dans l’intérieur du château. Comme Frédéric et Roberto n’ont pas quitté le théâtre, il nous est impossible d’indiquer un changement de scène. Mais enfin le lecteur est averti, nous sommes maintenant dans le château de Belflor, ou de Miraflor.