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JOURNÉE II, SCÈNE I.

don félix.

Puisque le hasard vous fournit une excuse, restez, et dites-moi un peu ce qu’elle fait en ce moment.

flora.

Cette musique doit vous le dire mieux que moi

tristan.

Surtout grâce aux paroles[1].

don félix.

Oh ! si de quelque endroit je pouvais la voir !

flora.

Cela n’est pas possible… Mais, ô ciel ! qu’est-ce que ce panier ? qu’est-ce que ces bijoux ?… Cela n’est pas de la maison. Il paraît que vous avez déjà quelqu’un qui vous fait des cadeaux ? Je le dirai à ma maîtresse, afin qu’elle se conduise en conséquence.

don félix.

Ne lui parlez de rien ; car je serais moi-même embarrassé de vous dire comment cela m’est venu.

flora.

Ma maîtresse n’est point curieuse de le savoir.

don félix.

Je le conçois.

tristan.

C’est une rusée, une trompeuse, une coquine qui se tait, donne, et refuse de prendre ce qu’on lui offre.

flora.

Le nigaud !… Et par où est-elle entrée ?

tristan.

Par cette rue-ci.

flora.

Et vous ne savez pas qui c’est ?

don félix.

Mon Dieu ! non.

flora.

Et qui soupçonnez-vous ?

don félix.

Que sais-je ?… Ce sera sans doute la dame qui m’a engagé dans sa défense.

tristan.

Je m’en assurerai, si elle revient.

flora.

Pourquoi êtes-vous si mal pour elle ?

tristan.

Parce qu’elle me fait ma part en coups de bâton.

  1. Le texte dit mot à mot : « Oui, car toucher d’un instrument et chanter, c’est toujours une même chose. » Du reste, le verbe tocar, toucher, a en espagnol toutes les acceptions qu’a en français le verbe correspondant, et je ne serais pas étonné que Calderon ait voulu jouer sur les divers sens de ce mot.