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JOURNÉE III, SCÈNE IV.

lisardo.

Tandis que je causais avec cette dame, son père est arrivé du dehors. Il a frappé. Voyant qu’on tardait à lui ouvrir, il a jeté la porte à bas. Entré dans la chambre, il a tiré l’épée. Le flambeau s’étant éteint, j’ai pu délivrer ma dame. Comme vous connaissez mieux que moi les rues d’Ocaña, veuillez l’emmener, je vous prie. J’empêcherai, cependant, que personne ne vous suive. À cet effet Calabazas restera avec moi.

calabazas, à part.

Je resterai s’il n’y a pas de danger.

don félix.

Il vaudrait mieux peut-être qu’il l’accompagnât et que nous demeurassions nous deux.

lisardo.

Ce serait la laisser aller seule. Le premier devoir, en pareille circonstance, est de sauver la dame. Ainsi, don Félix, chargez-vous d’elle et la mettez en sûreté.

don félix.

Vous avez raison. (À Marcela.) Prenez mon bras, madame. (À part.) Enfin, Laura, te voilà en mon pouvoir !

marcela, à part.

Hélas ! je me meurs.

don félix, à part.

Mon cœur palpite.

marcela, à part.

Que je tremble !

don félix.

Venez, madame ; bien que vous ne le méritiez pas, je vous sauverai ; car je suis celui que je suis.

marcela, à part.

Y eut-il jamais une femme aussi infortunée ?

don félix, à part.

Y eut-il jamais un homme plus malheureux ?

Don Félix et Marcela sortent.
lisardo.

Ne t’éloigne pas, Calabazas.


Entre FABIO, tenant d’une main un flambeau et de l’autre une épée. LELIO et plusieurs autres valets le suivent l’épée nue.
fabio.

Oui, les forces me manquent, mais non les forces de l’honneur. J’en ai assez pour la vengeance.

lisardo.

Arrêtez ! on ne passe pas par ici.

fabio.

Mon épée s’ouvrira un passage à travers votre cœur.

Ils se battent tous.